Depuis plusieurs décennies, notre culture de la pomme de terre est menacée par le mildiou, causé par un microorganisme fongiforme, Phytophthora infestans. Durant l’été humide de 2012, les producteurs de pommes de terre se sont vus contraints de pulvériser plus de 20 fois pour se débarrasser de la maladie. Ceci implique non seulement une lourde charge écologique et sociale mais également des coûts importants pour les agriculteurs belges, lesquels se sont chiffrés à 55 millions d’euros selon les estimations (achat et épandage des produits, perte de rendement et pertes durant le stockage des pommes de terre).
La culture de pommes de terre à résistance durable pourrait, selon les attentes, réduire de 80% l’utilisation de fongicides dans ce type de culture. Les producteurs de pommes de terre pourront également y gagner d’un point de vue financier même si les plants résistants sont plus chers. De plus, les agriculteurs ne seront plus obligés de se tenir prêts de jour comme de nuit avec leurs pulvérisateurs, ce qui permettrait de réduire le stress. Par ailleurs, les chercheurs prédisent également un effet favorable pour les producteurs de pommes de terre qui n’optent pas pour ces pommes de terre à résistance durable : en effet, plus on plantera d’hectares de pommes de terre à résistance durable, moins grandes seront les chances de prolifération de Phytophthora.
Dans le cadre de l’expérience scientifique sur le terrain menée à Wetteren en 2011 et 202, vingt-six lignées différentes de pommes de terre génétiquement modifiées ont été testées et contenaient de 1 à 3 gènes de résistance naturels, provenant de plants sauvages apparentés à notre culture de pommes de terre. Ces lignées ont été comparées à des variétés de référence sensibles telles que Désirée, Bintje, Nicola, Agria et Innovator, et aux variétés non sensibles Bionica, Toluca et Sarpo-Mira. Les pommes de terre génétiquement modifiées ont affiché de meilleurs résultats par rapport aux variétés non sensibles utilisées dans l’agriculture biologique, à savoir Bionica et Toluca. Les résultats de cet essai sur le terrain seront publiés dans une revue scientifique internationale.
Les gènes de résistance naturels ont été introduits dans la variété demi-tardive Désirée et contiennent encore, dans plusieurs cas, un marqueur de sélection étranger. Les lignées qui contiennent uniquement des gènes de résistance naturels et aucun matériel génétique étranger sont issues de ce qu’on appelle la « cisgenèse ». Les plants de pommes de terre testés sur le terrain étaient issus de lignées expérimentales et ne seront pas commercialisés. Pour amorcer le véritable développement d’une culture plus durable de la pomme de terre, il est à présent nécessaire d’introduire des combinaisons adéquates de gènes de résistance dans des variétés intéressantes pour l’agriculteur belge (p.ex. Bintje). Il faudra encore quelques années avant que de telles pommes de terre soient disponibles pour de nouveaux essais sur le terrain.